la petite baleine
Cet été là je devais aller à Newport Rhode Island, pour ramener Arauna IV, un voilier que je connaissais bien. Après le coup de canon,du départ de la Transat à Plymouth avec quelques amis nous avions filé aussitôt vers les Scillies...
Nous étions tranquilles dans un pub n'enquillant d' irish coffee quand une amie vint me parler à l'oreille... Il y a des choses que l'on ne peut pas dire autrement qu'en chuchotant, on sait lesquels.. Elle m'apprit le naufrage d'Arauna, il venait de sombrer là au large pas loin. Alors je l'ai vu.. je l'ai vu couler mon bateau, mon ami.. toutes voiles dehors dehors glissant vers les ténèbres et j'ai eu mal pour lui.
Ce bateau, je l'aimais, j'avais passé près de six mois à son bord... Nous avions été heureux et avions soufferts ensemble les coups de butoir de la mer nous faisaient mal à l'un et à l'autre. Souvent lors de nos tête à tête, je lui parlais, je le flattais aussi, lui tapotait la croupe, d'autre fois énervée, lui ai flanqué des coups de pied aussi.
J'ai souvent pensé à lui comme à une espèce d'amour perdu.
Nous avions une amie et moi, déjà réservé nos vols vers Newport.. Un peu aventurières, nous avons finalement peu hésité. Je savais que je trouverais facilement un place, pour deux nous verrions bien..
Après deux jours new-yorkais... Arrivées à Newport ,iI s'agissait maintenant de trouver assez vite un hébergement sur un bateau.. Sur les pontons ou au cours d'une fête, je ne sais plus, je croisais kerso, II nous proposa en échange du rangement de son bateau de pouvoir nous y installer...Ce que nous fîmes contentes de l'aubaine... Son bateau devint vite notre maison et Kerso s'en amusa qui racontait à tout le monde que nous y avions même mis des fleurs.. Il cherchait quelqu'un pour ramener son bateau... Je sentais le bateau trop physique pour moi, je préférais qu'on trouve un skipper... Je savais aussi que je naviguerai plus tranquillement déchargée de cette responsabilité. . Besteaver.. était l'un des Kriter, le VI.. Raide à la toile, un genre de fusée plus affûté pour le près que les vents portants...
Il y avait une bonne dizaine de garçons parés à l'aventure.. Nous avons fait comme un casting... Et nous sommes décidés sur deux d'entre eux dont l'un devint le skipper du bateau...
Nous n'avions pas encore quitté Newport que les brumes habituelles des lieux nous couvrait d'un manteau opaque et humide... Des voiliers fantômes nous frôlaient rentrant au port... La corne de brume nous servit bien …..
Très belle et agréable traversée vers les Açores... Les garçons trouvait bien plus délicieux de naviguer avec des filles plutôt qu'entre hommes......
Ce fut une navigation parfaite... La mer était belle et grande... les gens contents...
Au large des Açores, nous eûmes une belle tempête... La veille quand le vent et la mer commençaient à forcir nous nous amusions à faire des concours de surfs... D'énormes vagues nous rattrapaient dans de gros rouleaux d'écume... Superbe.
Dans la nuit qui suivit, je fus un peu moins fière quand le bateau filait dans la nuit noire dévalant les vagues plein vent arrière et génois en ciseau. Les surfs devaient durer un minute. Je ne sentais plus la barre (franche) et quand au creux de la vague le bateau se plantait un peu dans celle qui précédait, il fallait être vigilant pour ne pas le laisser partir... Malgré ces conditions pour le moins parfois acrobatiques, j'avais décidé, d'aller jusqu'au bout de mon quart...
Le pilote ne marchait pas.. Alors quand il a fallu réveiller la personne qui devait prendre ma suite, j'étais bien embêtée... Pas possible d'appeler, la mer et le vent s'alliaient dans leur vacarme, jamais on ne m'entendrait. Difficile aussi dans ces conditions de lâcher la barre... Je décidais de compter de combien de temps je disposais pour vite descendre dans le bateau et revenir à temps... Une vingtaine de secondes tout au plus.. Le bateau était assez étroit et la descente abrupte... Je dévalais les trois ou quatre marches et vite secouais le matelot suivant, refilais dans l'autre sens.... Je tirais sur la barre pour remettre le bateau dans le bon axe.. Ouf
Je n'étais pas couché encore quand le skipper du bateau me demanda de réveiller les autres pour qu'on réduise la toile...
Le lendemain soir nous arrivions à Horta...
On arrive souvent au port la nuit ou au petit matin après une traversée, là il y a toujours quelqu'un sur le quai qui semble vous attendre, prend les aussières les amarre et vous offre de son paquet tendu une cigarette... Alors après un peu las, on déguste la petite cibiche tranquille dans le cockpit sous les lumières d'un port inconnu dont on essaye de deviner au gré de ses ombres la géographie de son paysage...
A Horta, pour se rendre dans le centre, il faut faire le tour par les quais.. Le lendemain de notre arrivée alors que je faisais cette petite marche, je passais devant un camion dont la plate-forme arrière dégueulait littéralement de thons.. Je regardais l'étrange cargaison quand un jeune açorien d'un signe me dit de venir et m'en offrit deux.... Je revins au bateau fière un thon dans chaque main....
Étions-nous en quelque sorte affamés..... un peu fatigués des pâtes et du riz..
Toujours est-il que je me mis aux fourneaux.... Je tranchais le thon... Coupais quelques tomates, un peu d'ail.. le thon fut saisi, d'un côté, puis l'autre hop, là... tandis qu'autour mijotait le reste.... Un peu de sel, une tournée de poivre... c'était joli et ça sentait bon..
Quand nous nous mimes à table dans le carré du bateau..... Ce fut pour tous comme une extase.. Chaque bouchée me semblait plus délicieuse que la précédente...
Quel étrange sortilège nous avait pris tout d'un coup pour que nous soyons tous dans cette même osmose de béatitude alimentaire. Sans doute quand on s'habitue à une alimentation un peu sommaire, quand on est un peu en manque, dès que l'assiette offre un peu autre chose, alors on le savoure.. Et pus et aussi quand on revient de mer tout prend tellement une autre dimension, parfois chaque petit rien de la terre devient merveilleux alors d'autres peuvent vous exaspérer soudain.
Et là nous avions en plus et qui rajoutait à l'extase, cette espèce de communion d'âmes quand elles se plaisent et se comprennent.
Ce fut l'un de mes plus beaux diners...
Nous avions vite sympathisé avec le jeune homme donneur de thon.
Un soir, sans un mot il nous invita à le suivre..
Il faisait assez chaud dehors malgré la nuit... Il nous amena vers la conserverie pas très loin. C'était un lieu vaste vaste, vide qui donna dès qu'on y pénétra de la résonance à nos voix. Nous avons traversés plusieurs salles.. Dans un fracas métallique il ouvra une nouvelle porte. C'était une chambre froide, il y avait comme une espèce de brouillard, un hammam à la moiteur glacé... j'ai frissonné... Nous étions comme aveugles dans l'opacité cotonneuse..... Et puis soudain le voile blanc s'est un peu déchiré... Au début nous n'avons pas compris, là ce qui reposait plus loin... cette silhouette sombre... il y avait en nous, dans nos attitudes quelque chose de l'ordre du religieux, du sacrifiel..... Nous nous mimes à chuchoter... C'était une jeune baleine de cinq ou six mètres.. Le froid avait saisi le grand poisson mais ne l'avait pas écrasé, on aurait dit qu'il nageait encore, qu'il allait sonder bientôt.. Sentiments contradictoires. Beauté et tristesse mêlées. Court moment d'éternité. Une sculpture glacée sur les veinures du marbre blanc.
Nous ressortîmes de là, silencieux, frissonnants encore dans la nuit chaude.
Nous étions tranquilles dans un pub n'enquillant d' irish coffee quand une amie vint me parler à l'oreille... Il y a des choses que l'on ne peut pas dire autrement qu'en chuchotant, on sait lesquels.. Elle m'apprit le naufrage d'Arauna, il venait de sombrer là au large pas loin. Alors je l'ai vu.. je l'ai vu couler mon bateau, mon ami.. toutes voiles dehors dehors glissant vers les ténèbres et j'ai eu mal pour lui.
Ce bateau, je l'aimais, j'avais passé près de six mois à son bord... Nous avions été heureux et avions soufferts ensemble les coups de butoir de la mer nous faisaient mal à l'un et à l'autre. Souvent lors de nos tête à tête, je lui parlais, je le flattais aussi, lui tapotait la croupe, d'autre fois énervée, lui ai flanqué des coups de pied aussi.
J'ai souvent pensé à lui comme à une espèce d'amour perdu.
Nous avions une amie et moi, déjà réservé nos vols vers Newport.. Un peu aventurières, nous avons finalement peu hésité. Je savais que je trouverais facilement un place, pour deux nous verrions bien..
Après deux jours new-yorkais... Arrivées à Newport ,iI s'agissait maintenant de trouver assez vite un hébergement sur un bateau.. Sur les pontons ou au cours d'une fête, je ne sais plus, je croisais kerso, II nous proposa en échange du rangement de son bateau de pouvoir nous y installer...Ce que nous fîmes contentes de l'aubaine... Son bateau devint vite notre maison et Kerso s'en amusa qui racontait à tout le monde que nous y avions même mis des fleurs.. Il cherchait quelqu'un pour ramener son bateau... Je sentais le bateau trop physique pour moi, je préférais qu'on trouve un skipper... Je savais aussi que je naviguerai plus tranquillement déchargée de cette responsabilité. . Besteaver.. était l'un des Kriter, le VI.. Raide à la toile, un genre de fusée plus affûté pour le près que les vents portants...
Il y avait une bonne dizaine de garçons parés à l'aventure.. Nous avons fait comme un casting... Et nous sommes décidés sur deux d'entre eux dont l'un devint le skipper du bateau...
Nous n'avions pas encore quitté Newport que les brumes habituelles des lieux nous couvrait d'un manteau opaque et humide... Des voiliers fantômes nous frôlaient rentrant au port... La corne de brume nous servit bien …..
Très belle et agréable traversée vers les Açores... Les garçons trouvait bien plus délicieux de naviguer avec des filles plutôt qu'entre hommes......
Ce fut une navigation parfaite... La mer était belle et grande... les gens contents...
Au large des Açores, nous eûmes une belle tempête... La veille quand le vent et la mer commençaient à forcir nous nous amusions à faire des concours de surfs... D'énormes vagues nous rattrapaient dans de gros rouleaux d'écume... Superbe.
Dans la nuit qui suivit, je fus un peu moins fière quand le bateau filait dans la nuit noire dévalant les vagues plein vent arrière et génois en ciseau. Les surfs devaient durer un minute. Je ne sentais plus la barre (franche) et quand au creux de la vague le bateau se plantait un peu dans celle qui précédait, il fallait être vigilant pour ne pas le laisser partir... Malgré ces conditions pour le moins parfois acrobatiques, j'avais décidé, d'aller jusqu'au bout de mon quart...
Le pilote ne marchait pas.. Alors quand il a fallu réveiller la personne qui devait prendre ma suite, j'étais bien embêtée... Pas possible d'appeler, la mer et le vent s'alliaient dans leur vacarme, jamais on ne m'entendrait. Difficile aussi dans ces conditions de lâcher la barre... Je décidais de compter de combien de temps je disposais pour vite descendre dans le bateau et revenir à temps... Une vingtaine de secondes tout au plus.. Le bateau était assez étroit et la descente abrupte... Je dévalais les trois ou quatre marches et vite secouais le matelot suivant, refilais dans l'autre sens.... Je tirais sur la barre pour remettre le bateau dans le bon axe.. Ouf
Je n'étais pas couché encore quand le skipper du bateau me demanda de réveiller les autres pour qu'on réduise la toile...
Le lendemain soir nous arrivions à Horta...
On arrive souvent au port la nuit ou au petit matin après une traversée, là il y a toujours quelqu'un sur le quai qui semble vous attendre, prend les aussières les amarre et vous offre de son paquet tendu une cigarette... Alors après un peu las, on déguste la petite cibiche tranquille dans le cockpit sous les lumières d'un port inconnu dont on essaye de deviner au gré de ses ombres la géographie de son paysage...
A Horta, pour se rendre dans le centre, il faut faire le tour par les quais.. Le lendemain de notre arrivée alors que je faisais cette petite marche, je passais devant un camion dont la plate-forme arrière dégueulait littéralement de thons.. Je regardais l'étrange cargaison quand un jeune açorien d'un signe me dit de venir et m'en offrit deux.... Je revins au bateau fière un thon dans chaque main....
Étions-nous en quelque sorte affamés..... un peu fatigués des pâtes et du riz..
Toujours est-il que je me mis aux fourneaux.... Je tranchais le thon... Coupais quelques tomates, un peu d'ail.. le thon fut saisi, d'un côté, puis l'autre hop, là... tandis qu'autour mijotait le reste.... Un peu de sel, une tournée de poivre... c'était joli et ça sentait bon..
Quand nous nous mimes à table dans le carré du bateau..... Ce fut pour tous comme une extase.. Chaque bouchée me semblait plus délicieuse que la précédente...
Quel étrange sortilège nous avait pris tout d'un coup pour que nous soyons tous dans cette même osmose de béatitude alimentaire. Sans doute quand on s'habitue à une alimentation un peu sommaire, quand on est un peu en manque, dès que l'assiette offre un peu autre chose, alors on le savoure.. Et pus et aussi quand on revient de mer tout prend tellement une autre dimension, parfois chaque petit rien de la terre devient merveilleux alors d'autres peuvent vous exaspérer soudain.
Et là nous avions en plus et qui rajoutait à l'extase, cette espèce de communion d'âmes quand elles se plaisent et se comprennent.
Ce fut l'un de mes plus beaux diners...
Nous avions vite sympathisé avec le jeune homme donneur de thon.
Un soir, sans un mot il nous invita à le suivre..
Il faisait assez chaud dehors malgré la nuit... Il nous amena vers la conserverie pas très loin. C'était un lieu vaste vaste, vide qui donna dès qu'on y pénétra de la résonance à nos voix. Nous avons traversés plusieurs salles.. Dans un fracas métallique il ouvra une nouvelle porte. C'était une chambre froide, il y avait comme une espèce de brouillard, un hammam à la moiteur glacé... j'ai frissonné... Nous étions comme aveugles dans l'opacité cotonneuse..... Et puis soudain le voile blanc s'est un peu déchiré... Au début nous n'avons pas compris, là ce qui reposait plus loin... cette silhouette sombre... il y avait en nous, dans nos attitudes quelque chose de l'ordre du religieux, du sacrifiel..... Nous nous mimes à chuchoter... C'était une jeune baleine de cinq ou six mètres.. Le froid avait saisi le grand poisson mais ne l'avait pas écrasé, on aurait dit qu'il nageait encore, qu'il allait sonder bientôt.. Sentiments contradictoires. Beauté et tristesse mêlées. Court moment d'éternité. Une sculpture glacée sur les veinures du marbre blanc.
Nous ressortîmes de là, silencieux, frissonnants encore dans la nuit chaude.
Une arrivée discrète
Fin juin, nous arrivions à Lorient, terme de la Transat en Double après deux traversées de l'Atlantique, quelques 42 jours de mer et un arrêt forcé, mais délicieux, quoique fort court, huit heures environ aux Bermudes. Notre grand voile dont nous défaisions les ris sous un grain inopiné avait dans un grand fasseillement presque rendu l'âme, déchirée sur toute sa longueur à la hauteur du troisième ris... J'avais pourtant prévenu ma co-équipière, en l'occurrence skipper du bateau qu'il valait mieux peut-être attendre un peu... Elle était souvent plus combative que moi pour décider des manœuvres à effectuer.. Disons que j'envisageais les choses avec davantage de tranquillité et de douceur sans doute. Plusieurs de nos nuits furent épiques et fatigantes où les changements de voile d'avant se succédaient, envoi de spi, affalage de celui-ci une heure plus tard, renvoi du génois... Tout ça sans enrouleur, chaussette pour le spi, classiques mousquetons pour le génois..... et nous étions grées en cotre...
Parfois, il m'arrivait de me lever la nuit pour prendre mon quart alors qu'il n'était pas encore l'heure... Nous prenions celui-ci toutes les deux heures en moyenne. Quand on dort sur un bateau, le moindre changement dans le rythme de celui-ci, dans sa manière d'épouser la mer, d'aborder la vague, dans la musique particulière de son chuintement dans l'eau réveille la personne endormie... surtout si on est en course, il y a comme un signal inconscient...
Il y a comme ça en mer des intuitions particulières, peut-être ne sont-elles pas le fait de tout marin.. je ne sais pas... L'une d'elles me troublait parfois, celle de sentir clairement une présence humaine, par là quelque part au loin. C'est un peu, comme quand vous marchez dans une rue, et que soudain sans que votre esprit n'ait pris conscience encore du geste effectué, vous jetez un regard là, vers une fenêtre dans les étages d'un immeuble où quelqu'un vous regarde..
A la barre vous voyez l'ensemble du cercle de l'horizon sauf celui caché par la voile d'avant.. Il m'est arrivé plusieurs fois de me dire, va voir derrière le génois, quand par ailleurs, ma pensée me soufflait mais non, il n'y a pas de bateau, nous n'en croisons seulement que tous les trois ou quatre jours et encore, nous ne sommes pas sur une route de cargos... A chaque fois que j'ai ressenti fortement cette espèce de commandement intime, un cargo naviguait là pas très loin.
Une seule fois, je décidais de ne pas répondre à mon intuition première... Il faisait très beau, nous naviguions tranquilles... Je réglais le pilote aérien.. et j'avais décidé à l'avance, que je me grillerais une petite cibiche... J'étais partie, pas très grande fumeuse, avec une seule cartouche de cigarettes, les tempêtes du début ne firent qu'une bouchée salée de l'un après l'autre de mes paquets.. que je ne songeais même pas à faire sécher.
Ce jour là, j'avais rangé la table des cartes et au fond de celle-ci, j'avais trouvé un vieux paquet de tabac à rouler... Je ne pus m'empêcher de le sentir... et là... ce petit goût de miel me donna furieusement l'envie de fumer.. j'avais le tabac mais pas le papier... Mon journal de bord fit les frais de cette envie. Je déchirais des languettes de papier dans lesquelles je fourrais le tabac... Après il s'agissait de fermer et de coincer la petite cigarette entre deux doigts pour éviter que l'air ne se faufile .. et voilà le tour était plus ou moins joué...
Donc, après avoir au mieux réglé le pilote, je préférais obéir à ce plaisir plutôt qu'à mon intuition... Je savourais le petit mégot... quand je vis apparaître sous mon vent un super tanker... il n'était pas loin... cent mètres environ, nos routes étaient parallèles. Il s'appelait « Franco gaz » ...
Quand on croisait des cargos, on entrait en contact avec la VHF et nous avions toujours eu des discussions agréables, il faut dire aussi, qu'en plein atlantique un petit voilier avec deux nanas à bord avait de quoi les distraire un peu.... Certains des navires s'approchaient même de nous, s'ils n'étaient pas trop loin et nous saluaient d'un coup de sirène, on apercevait les marins sur le pont là haut qui nous faisaient signe .. Comme à l'époque nous n'avions pas de GPS, il était utile de leur demander leur position pour vérifier la nôtre surtout quand la météo ne nous permettait pas d'avoir pu faire un point correct et que nous naviguions à l'estime..
Bref, j'essayais donc d'entrer en contact avec le super tanker... Rien.. Je me disais... ah voilà bien les français... ils ne répondent pas... Quand une dizaine de minutes plus tard, je vis le gros bateau remonter derrière moi, je compris alors le motif de leur silence...Il devaient être énervés, ils avaient dû se dérouter pour éviter une collision probable...
Mais je m'égare, je voulais raconter autre chose... notre arrivée...
Il est important de dire aussi que nous n'avions plus de moyen de communication à notre arrivée. Nous avions eu quelques déboires à la fin de la course, notre mat ne tenait plus que grâce à un bras de spi attaché par un cabestan à sa tête, notre étai nous ayant lâché quelques jours après avoir heurté une baleine... Le moteur dont la courroie s'était rompue avait entraîné différentes ruptures et la batterie plus assez chargée nous empêchait l'usage du démarreur... Imaginez le démarrage à la manivelle... Par la suite, nos réserves de gaz-oil s'avèrent sous-estimées et comme nous tentions sur le même bord de nous délivrer des calmes de l'anticyclone du Golfe de Gascogne, la pipette d'aspiration ne faisait plus correctement son travail, nous devions alors délivrer le gaz-oil de toutes les petites bulles d'air qui s'étaient constituées... Après nettoyage des fonds obligatoire... joyeuse odeur dans la chaleur moite du ventre du bateau..
Nous faisions l'économie du peu d'énergie qu'il restait encore dans les batteries la réservant pour la radio... Un peu folles quand même nous avons traversés les deux lignes de cargos sans feu aucun... Au lever du jour, nous étions au large de Groix... sans radio.. Il fallait que nous avertissions le comité de course que nous allions passer la ligne... Le temps était gris, orageux.. très peu de vent... La mer basse ne nous permettait pas de rentrer jusqu'à Lorient sans moteur... Les bateaux de pêche sortaient.. J'avais mon plan en tête... Ma co-équipière suggérait qu'on passe la ligne et qu'on revienne prendre un coffre à Groix... Moi je ne voulais pas... J'avais envie qu'on arrive enfin... Je lui fit quand même part de mon idée... demander à un des bateaux de pêche d'avertir le comité de course qu'on serait sur la ligne dans une demi-heure environ... Pour elle, il n'en était pas question, ces hommes travaillaient , on allait pas les embêter... et puis on était des grandes filles...Je gardais mon plan en tête, j'avais repéré qu'un bateau de pêche allait croiser notre route.. Je les entendis même s'exclamer : « Eh ! Ce sont les petites ... » ... J'en profitais pour les appeler... je leur demandais alors s'il pouvait prévenir de notre arrivée...Ils n'avaient pas de radio et allaient demander à une autre bateau... Ma co-équipère me tança tandis que j'étais ravie... Je suivais des yeux le bateau, je le vis plus loin qui s'accouplait à un autre...
Alors que nous franchissions la ligne un petit bateau venait à notre rencontre... Un membre du jury sauta à notre bord contrôler les scellés du moteur et différentes choses... Après une vingtaine de minutes, nous étions sur les pontons... Pas d'arrivée en fanfare... (Quoiqu'en passant devant un bateau de guerre, au petit coup de sifflet tous les marins se mirent au garde à vous à notre passage... sans doute un hasard, mais moi je le pris pour nous....)
Sans radio nous n'avions pu prévenir la veille les bateaux venus à notre rencontre... Nous arrivions huit jours après les premiers Eugène Riguidel et Gilles Gahinet sur notre petit monocoque de 38 pieds... Nous finîmes bien sûr par retrouver tout nos proches... sur les pontons qui tanguaient bien je dois dire...
Le soir j'étais invitée à une fête, pas pour mon arrivée, non une fête, chacun à son tour venait me voir, me féliciter... et moi, j'étais très mal à l'aise, trop de monde d'un coup, j'avais aussi la sensation de répéter cent fois la même chose, comme un disque rayé...Je n'avais qu'une envie m'échapper.. Je trouvais refuge dans une salle de bains... comme souvent quand on doute de soi, je me regardais dans le miroir, m'observais, pendant 42 jours je n'avais eu qu'un miroir de signalisation... Alors et sans doute à cause de mon malaise, je décidais qu'il fallait que je change de tête... Je trouvais des ciseaux et me coupais les cheveux... ils n'étaient pas très longs, mais je les coupais bien quand même... Quand je finis par redescendre, on me regardait plus encore...
J'ai fini par partir assez vite et peu à peu me suis habituée à nouveau à fréquenter mes semblables..
Parfois, il m'arrivait de me lever la nuit pour prendre mon quart alors qu'il n'était pas encore l'heure... Nous prenions celui-ci toutes les deux heures en moyenne. Quand on dort sur un bateau, le moindre changement dans le rythme de celui-ci, dans sa manière d'épouser la mer, d'aborder la vague, dans la musique particulière de son chuintement dans l'eau réveille la personne endormie... surtout si on est en course, il y a comme un signal inconscient...
Il y a comme ça en mer des intuitions particulières, peut-être ne sont-elles pas le fait de tout marin.. je ne sais pas... L'une d'elles me troublait parfois, celle de sentir clairement une présence humaine, par là quelque part au loin. C'est un peu, comme quand vous marchez dans une rue, et que soudain sans que votre esprit n'ait pris conscience encore du geste effectué, vous jetez un regard là, vers une fenêtre dans les étages d'un immeuble où quelqu'un vous regarde..
A la barre vous voyez l'ensemble du cercle de l'horizon sauf celui caché par la voile d'avant.. Il m'est arrivé plusieurs fois de me dire, va voir derrière le génois, quand par ailleurs, ma pensée me soufflait mais non, il n'y a pas de bateau, nous n'en croisons seulement que tous les trois ou quatre jours et encore, nous ne sommes pas sur une route de cargos... A chaque fois que j'ai ressenti fortement cette espèce de commandement intime, un cargo naviguait là pas très loin.
Une seule fois, je décidais de ne pas répondre à mon intuition première... Il faisait très beau, nous naviguions tranquilles... Je réglais le pilote aérien.. et j'avais décidé à l'avance, que je me grillerais une petite cibiche... J'étais partie, pas très grande fumeuse, avec une seule cartouche de cigarettes, les tempêtes du début ne firent qu'une bouchée salée de l'un après l'autre de mes paquets.. que je ne songeais même pas à faire sécher.
Ce jour là, j'avais rangé la table des cartes et au fond de celle-ci, j'avais trouvé un vieux paquet de tabac à rouler... Je ne pus m'empêcher de le sentir... et là... ce petit goût de miel me donna furieusement l'envie de fumer.. j'avais le tabac mais pas le papier... Mon journal de bord fit les frais de cette envie. Je déchirais des languettes de papier dans lesquelles je fourrais le tabac... Après il s'agissait de fermer et de coincer la petite cigarette entre deux doigts pour éviter que l'air ne se faufile .. et voilà le tour était plus ou moins joué...
Donc, après avoir au mieux réglé le pilote, je préférais obéir à ce plaisir plutôt qu'à mon intuition... Je savourais le petit mégot... quand je vis apparaître sous mon vent un super tanker... il n'était pas loin... cent mètres environ, nos routes étaient parallèles. Il s'appelait « Franco gaz » ...
Quand on croisait des cargos, on entrait en contact avec la VHF et nous avions toujours eu des discussions agréables, il faut dire aussi, qu'en plein atlantique un petit voilier avec deux nanas à bord avait de quoi les distraire un peu.... Certains des navires s'approchaient même de nous, s'ils n'étaient pas trop loin et nous saluaient d'un coup de sirène, on apercevait les marins sur le pont là haut qui nous faisaient signe .. Comme à l'époque nous n'avions pas de GPS, il était utile de leur demander leur position pour vérifier la nôtre surtout quand la météo ne nous permettait pas d'avoir pu faire un point correct et que nous naviguions à l'estime..
Bref, j'essayais donc d'entrer en contact avec le super tanker... Rien.. Je me disais... ah voilà bien les français... ils ne répondent pas... Quand une dizaine de minutes plus tard, je vis le gros bateau remonter derrière moi, je compris alors le motif de leur silence...Il devaient être énervés, ils avaient dû se dérouter pour éviter une collision probable...
Mais je m'égare, je voulais raconter autre chose... notre arrivée...
Il est important de dire aussi que nous n'avions plus de moyen de communication à notre arrivée. Nous avions eu quelques déboires à la fin de la course, notre mat ne tenait plus que grâce à un bras de spi attaché par un cabestan à sa tête, notre étai nous ayant lâché quelques jours après avoir heurté une baleine... Le moteur dont la courroie s'était rompue avait entraîné différentes ruptures et la batterie plus assez chargée nous empêchait l'usage du démarreur... Imaginez le démarrage à la manivelle... Par la suite, nos réserves de gaz-oil s'avèrent sous-estimées et comme nous tentions sur le même bord de nous délivrer des calmes de l'anticyclone du Golfe de Gascogne, la pipette d'aspiration ne faisait plus correctement son travail, nous devions alors délivrer le gaz-oil de toutes les petites bulles d'air qui s'étaient constituées... Après nettoyage des fonds obligatoire... joyeuse odeur dans la chaleur moite du ventre du bateau..
Nous faisions l'économie du peu d'énergie qu'il restait encore dans les batteries la réservant pour la radio... Un peu folles quand même nous avons traversés les deux lignes de cargos sans feu aucun... Au lever du jour, nous étions au large de Groix... sans radio.. Il fallait que nous avertissions le comité de course que nous allions passer la ligne... Le temps était gris, orageux.. très peu de vent... La mer basse ne nous permettait pas de rentrer jusqu'à Lorient sans moteur... Les bateaux de pêche sortaient.. J'avais mon plan en tête... Ma co-équipière suggérait qu'on passe la ligne et qu'on revienne prendre un coffre à Groix... Moi je ne voulais pas... J'avais envie qu'on arrive enfin... Je lui fit quand même part de mon idée... demander à un des bateaux de pêche d'avertir le comité de course qu'on serait sur la ligne dans une demi-heure environ... Pour elle, il n'en était pas question, ces hommes travaillaient , on allait pas les embêter... et puis on était des grandes filles...Je gardais mon plan en tête, j'avais repéré qu'un bateau de pêche allait croiser notre route.. Je les entendis même s'exclamer : « Eh ! Ce sont les petites ... » ... J'en profitais pour les appeler... je leur demandais alors s'il pouvait prévenir de notre arrivée...Ils n'avaient pas de radio et allaient demander à une autre bateau... Ma co-équipère me tança tandis que j'étais ravie... Je suivais des yeux le bateau, je le vis plus loin qui s'accouplait à un autre...
Alors que nous franchissions la ligne un petit bateau venait à notre rencontre... Un membre du jury sauta à notre bord contrôler les scellés du moteur et différentes choses... Après une vingtaine de minutes, nous étions sur les pontons... Pas d'arrivée en fanfare... (Quoiqu'en passant devant un bateau de guerre, au petit coup de sifflet tous les marins se mirent au garde à vous à notre passage... sans doute un hasard, mais moi je le pris pour nous....)
Sans radio nous n'avions pu prévenir la veille les bateaux venus à notre rencontre... Nous arrivions huit jours après les premiers Eugène Riguidel et Gilles Gahinet sur notre petit monocoque de 38 pieds... Nous finîmes bien sûr par retrouver tout nos proches... sur les pontons qui tanguaient bien je dois dire...
Le soir j'étais invitée à une fête, pas pour mon arrivée, non une fête, chacun à son tour venait me voir, me féliciter... et moi, j'étais très mal à l'aise, trop de monde d'un coup, j'avais aussi la sensation de répéter cent fois la même chose, comme un disque rayé...Je n'avais qu'une envie m'échapper.. Je trouvais refuge dans une salle de bains... comme souvent quand on doute de soi, je me regardais dans le miroir, m'observais, pendant 42 jours je n'avais eu qu'un miroir de signalisation... Alors et sans doute à cause de mon malaise, je décidais qu'il fallait que je change de tête... Je trouvais des ciseaux et me coupais les cheveux... ils n'étaient pas très longs, mais je les coupais bien quand même... Quand je finis par redescendre, on me regardait plus encore...
J'ai fini par partir assez vite et peu à peu me suis habituée à nouveau à fréquenter mes semblables..
Le bateau dans la nuit
Il y a un bateau là, juste devant la maison. On dirait qu'il s'est mis là exprès. Il est arrivé hier dans la nuit et quand j'ai regardé dehors la mer juste avant de me coucher, j'avais ouvert la porte pour laisser un peu d'air du large entrer dans la maison, j'ai cru en voyant son feu de mât blanc, que c'était une étoile d'abord, et après une fusée blanche que quelque marin s'était amusé à tirer dans la nuit quand j'ai aperçu l'ombre du bateau.
J'ai pensé que c'était étrange un bateau qui venait s'ancrer comme ça juste en face dans la nuit que ses occupants venaient peut-être pour me voir... Parce que certes la mer est calme et il y peu de vent, mais peu de bateaux se mettent là au mouillage, ils vont plutôt jusque aux ports de Sainte Marine, Bénodet ou Loctudy... parce qu'ainsi le matin, ils ont l'eau, l'électricité, les commodités de la terre... qu'ils peuvent aussi être les premiers clients à la boulangerie ou du bistrot du port.
Et puis quand un bateau s'arrête là en face de votre maison on a toujours l'imagination qui erre vers son bord... Le mythe du Flying Dutschman n'est jamais si loin si on a l'âme un peu maritime et aventurière. Le marin solitaire errant sur les mers à la recherche de sa dulcinée qui le délivrera de son sort mais sans doute
immanquablement l'emprisonnera dans bien d'autres sortilèges...
D'une prison l'autre, certes plus douce...
Ce matin le bateau est toujours là, tout semble calme à son bord... nulle petite embarcation qui viendrait vers la plage, vers le sable, la dune, la maison.
Je n'ai pas très bien dormi et il fait gris, un peu orageux mais encore frais, il est tôt encore.. Souvent en mer justement quand on rencontre ce temps là, celui qui fait froncer les yeux de trop de lumière blanche alors on entend de très loin tous les bruits de la mer.
Je me souviens d'un jour, pas très loin des Bermudes, dans le fameux triangle justement, où l'on entendait chaque mouvement dans l'eau de tous nos voisins poissons de tout genre, quelques géants et lents gobicéphales, des petits flops flops de certains plus petits et nerveux quand nous vimmes comme dans une longue procession un nombre incroyable de dauphins, ils étaient comme en une longue file d'une centaine de mètres, plusieurs milliers se dirigeant vers une destination contraire à la nôtre, nous croisant sans un regard bien décidés à aller vers un autre ailleurs.
Les dauphins aiment à s'amuser avec l'étrave d'un bateau quand il file bien dans les vagues, un bateau presque à l'arrêt les intéresse beaucoup moins. Mais je ne pouvais les laisser passer ainsi sans un contact avec eux... Alors je sifflais un peu, m'essayant aux ultra sons... ça a toujours marché quand je les appelais ainsi... et là aussi, certains se détachèrent de la file et vinrent nous entourer, ils étaient un millier au moins quand d'autres continuaient leur route... c'était assez fou, ils venaient tranquilles frôler le bateau, se retournaient pour vous regarder, avec cette manière particulière qu'ils ont comme ça de vous sourire un peu..
J'ai voulu filmer, j'ai filmé... mais je ne savais pas alors que ma petite caméra ne captait plus l'image, trop d'humidité avait eu sa peau.... Finalement parfois, c'est mieux de garder ça en soi, ça permet de le raconter plutôt que de montrer... ça oblige à choisir au mieux ses mots pour le dire...
Ils sont restés une quinzaine de minutes puis ont filés plus loin retrouver leur groupe..
C'était un moment hors du temps, doux, calme.. un rêve éveillé... Et chacun est reparti vers sa destination..
Ces souvenirs, cette pensée vagabonde m'offrent... m'apportent souvent de bien jolies échappées … Ce doit être une chance...
Pendant que j'ai écrit, j'ai peur que le bateau ne soit parti et qu'aucun marin n'ait mit un frêle esquif à la mer pour venir jusqu'à la plage...
Je vais voir... Quand même...
Quelle rêveuse ...
J'ai pensé que c'était étrange un bateau qui venait s'ancrer comme ça juste en face dans la nuit que ses occupants venaient peut-être pour me voir... Parce que certes la mer est calme et il y peu de vent, mais peu de bateaux se mettent là au mouillage, ils vont plutôt jusque aux ports de Sainte Marine, Bénodet ou Loctudy... parce qu'ainsi le matin, ils ont l'eau, l'électricité, les commodités de la terre... qu'ils peuvent aussi être les premiers clients à la boulangerie ou du bistrot du port.
Et puis quand un bateau s'arrête là en face de votre maison on a toujours l'imagination qui erre vers son bord... Le mythe du Flying Dutschman n'est jamais si loin si on a l'âme un peu maritime et aventurière. Le marin solitaire errant sur les mers à la recherche de sa dulcinée qui le délivrera de son sort mais sans doute
immanquablement l'emprisonnera dans bien d'autres sortilèges...
D'une prison l'autre, certes plus douce...
Ce matin le bateau est toujours là, tout semble calme à son bord... nulle petite embarcation qui viendrait vers la plage, vers le sable, la dune, la maison.
Je n'ai pas très bien dormi et il fait gris, un peu orageux mais encore frais, il est tôt encore.. Souvent en mer justement quand on rencontre ce temps là, celui qui fait froncer les yeux de trop de lumière blanche alors on entend de très loin tous les bruits de la mer.
Je me souviens d'un jour, pas très loin des Bermudes, dans le fameux triangle justement, où l'on entendait chaque mouvement dans l'eau de tous nos voisins poissons de tout genre, quelques géants et lents gobicéphales, des petits flops flops de certains plus petits et nerveux quand nous vimmes comme dans une longue procession un nombre incroyable de dauphins, ils étaient comme en une longue file d'une centaine de mètres, plusieurs milliers se dirigeant vers une destination contraire à la nôtre, nous croisant sans un regard bien décidés à aller vers un autre ailleurs.
Les dauphins aiment à s'amuser avec l'étrave d'un bateau quand il file bien dans les vagues, un bateau presque à l'arrêt les intéresse beaucoup moins. Mais je ne pouvais les laisser passer ainsi sans un contact avec eux... Alors je sifflais un peu, m'essayant aux ultra sons... ça a toujours marché quand je les appelais ainsi... et là aussi, certains se détachèrent de la file et vinrent nous entourer, ils étaient un millier au moins quand d'autres continuaient leur route... c'était assez fou, ils venaient tranquilles frôler le bateau, se retournaient pour vous regarder, avec cette manière particulière qu'ils ont comme ça de vous sourire un peu..
J'ai voulu filmer, j'ai filmé... mais je ne savais pas alors que ma petite caméra ne captait plus l'image, trop d'humidité avait eu sa peau.... Finalement parfois, c'est mieux de garder ça en soi, ça permet de le raconter plutôt que de montrer... ça oblige à choisir au mieux ses mots pour le dire...
Ils sont restés une quinzaine de minutes puis ont filés plus loin retrouver leur groupe..
C'était un moment hors du temps, doux, calme.. un rêve éveillé... Et chacun est reparti vers sa destination..
Ces souvenirs, cette pensée vagabonde m'offrent... m'apportent souvent de bien jolies échappées … Ce doit être une chance...
Pendant que j'ai écrit, j'ai peur que le bateau ne soit parti et qu'aucun marin n'ait mit un frêle esquif à la mer pour venir jusqu'à la plage...
Je vais voir... Quand même...
Quelle rêveuse ...